Une grande partie de l’Afrique subsaharienne traverse une véritable transformation sociétale, qui se manifeste dans l’amélioration du niveau de vie, de l’éducation et de la santé. La région présente la plus grande proportion estimée d’avortements non sécurisés au monde, du fait de sa restriction légale et de sa stigmatisation. Elle se caractérise aussi par le plus grand nombre de décès maternels pour 100 000 avortements. Ces décès sont évitables et signalent un besoin urgent de soins après avortement de qualité et d’une pratique plus sécurisée de l’avortement. L’amélioration des services de contraception moderne permettrait d’éviter les grossesses non désirées qui conduisent en premier lieu à l’avortement.
L’avortement en Afrique subsaharienne
Incidence et tendances de l’avortement
- Selon les estimations, 33 avortements pour 1 000 femmes âgées de 15 à 49 ans se produisent chaque année, sans grande variation entre l’Afrique australe, l’Afrique centrale, l’Afrique de l’Est et l’Afrique de l’Ouest*. Ce taux est resté essentiellement inchangé ces 20 dernières années.
- Du fait de la croissance démographique, toutefois, le nombre annuel d’avortements survenus en Afrique subsaharienne a presque doublé entre 1995–1999 et 2015–2019, passant de 4,3 millions à 8,0 millions.
- Les taux sont élevés dans les grands centres urbains et parmi les adolescentes de 15 à 19 ans qui ont eu des rapports sexuels durant les 12 derniers mois.
Légalité de l’avortement
- Les femmes en âge de procréer (15 à 49 ans) de la région vivent en grande majorité — 92% — sous des juridictions où l’avortement est fortement ou modérément limité.
- En 2003, l’Union africaine a adopté le « Protocole de Maputo », dont l’Article 14 stipule que l’avortement doit être autorisé pour sauver la vie d’une femme et préserver sa santé physique ou mentale, ainsi qu’en cas de viol, d’inceste ou de malformation fœtale grave. Depuis lors, sept pays subsahariens ont réformé leur législation pour satisfaire — et, dans un cas, dépasser même — ces critères minimaux.
- Au total, 21 sur les 48 pays d’Afrique subsaharienne ont élargi la légalité de l’avortement entre 2000 et 2019.
Avortement non sécurisé
- En Afrique subsaharienne, plus de trois quarts (77%) des avortements seraient, selon les estimations, non sécurisés — ce qui veut dire qu’ils soient pratiqués par une personne non qualifiée, pratiqués selon une méthode non recommandée, ou les deux.
- À partir de 2019, il est estimé qu’environ 6,2 millions d’avortements non sécurisés interviennent chaque année dans la région. Les conséquences en sont lourdes pour les femmes, les familles et les systèmes de santé.
- L’Afrique subsaharienne présente le taux le plus haut de mortalité liée à l’avortement au monde, à 185 décès maternels pour 100 000 avortements. Cependant, ce taux représente une baisse de deux cinquièmes par rapport à 2000 du fait, en partie, d’améliorations sur le plan de la sécurité de l’avortement ainsi que de la disponibilité de soins après avortement et de leur qualité.
Grossesse non planifiée et avortement
- Parmi toutes les régions du monde, l’Afrique subsaharienne présente le taux le plus haut de grossesses (218 pour 1 000 femmes par an). La région se caractérise dès lors aussi par le taux le plus haut de grossesses non planifiées (91 pour 1 000), même si la proportion des grossesses qui sont non planifiées (42%) y est la plus faible.
- Face à une grossesse non planifiée, il est estimé que 37% des femmes recourent à l’avortement.
- Entre 1990–1994 et 2015–2019, la part des grossesses non planifiées interrompues a augmenté de 26% en Afrique centrale, de 44% en Afrique de l’Est et de l’Ouest, et de 72% en Afrique australe.
Recommandations
Améliorer la santé sexuelle et reproductive profite aux societés, il est donc indispensable d'élargir l’accès aux services de soins après avortement à toutes les femmes d’Afrique subsaharienne qui en ont besoin. Réduire la nécessité de soins après avortement en améliorant en premier lieu la sécurité de l’intervention exigera une collaboration soutenue entre tous les intervenants, en vue de l’application de critères légaux qui, pour le moins, satisfassent aux motivations reconnues dans le Protocole de Maputo.
- Les critères légaux établis dans le Protocole de Maputo offrent un plan directeur aux acteurs du plaidoyer et aux responsables politiques voués à l’amélioration de la santé des femmes. Sur les 39 pays subsahariens qui l’ont ratifié, seulement 15 respectent pleinement les conditions juridiques pour l’avortement.
- La légalité ne suffit pas à elle seule à assurer la disponibilité de services d’avortement de qualité et l’accès à ces services. La réforme doit s’accompagner d’une application intégrale, de sorte que toutes les femmes admises à l’avortement légal puissent l’obtenir en toute sécurité.
- Les femmes se font avorter indépendamment de la légalité de l’intervention. Un investissement continu dans l’amélioration des soins après avortement est nécessaire si l’on veut atténuer le préjudice causé par les avortements clandestins non sécurisés.
- Dans les pays dont les lois n’admettent pas ou guère l’avortement, les effets sur la santé d’interventions non sécurisées peuvent être minimisés par la promotion d’initiatives qui ont fait leurs preuves ailleurs, comme la diffusion d’une information exacte sur l’emploi du misoprostol seul, l’un de deux médicaments du protocole médicamenteux combiné.
- La prévention des grossesses non planifiées par l’élargissement de l’accès à la contraception moderne contribuera largement à réduire la nécessité de recourir à l’avortement.
Source
L’information présentée dans ce document peut être consultée dans Bankole A et al., De l’avortement non sécurisé à sécurisé en Afrique subsaharienne: des progrès lents mais constants, New York: Guttmacher Institute, 2020.
*Sous-régions définies selon la répartition de la Division de la statistique de l’ONU.
Notes au texte
*Sous-régions définies selon la répartition de la Division de la statistique de l’ONU.
Acknowledgments
Cette fiche d’information a bénéficié d’une subvention du ministère néerlandais des Affaires étrangères, ainsi que d’UK Aid sous les auspices du gouvernement britannique. Les observations et les conclusions exprimées ici sont celles des auteurs. Elles ne reflètent pas nécessairement les positions ou les politiques des donateurs et bailleurs de fonds.
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