Contexte
Après bientôt 30 ans de programmes de planning familial institués par l'Etat, la croissance de la prévalence contraceptive au Pakistan progresse avec une lenteur frustrante, de 5% en 1974-1975 à 24% en 1996-1997. Une proportion importante des femmes n'en désirent pas moins ne plus avoir d'enfants. Pour comprendre ce paradoxe, il importe d'identifier les aspects socioculturels et religieux de la société pakistanaise qui font obstacle à l'adoption des méthodes modernes de planning familial.
Méthodes
Des entrevues ont été menées dans les quartiers squattés de Karachi, au Pakistan, avec des femmes musulmanes de 30 ans et moins, leurs maris et leurs belles-mères, dans le but d'identifier les facteurs d'influence de la pratique contraceptive des couples. Des analyses de régression uni- et multivariées ont permis l'examen des associations entre la pratique contraceptive et diverses variables, dont les caractéristiques sociodémographiques; les croyances religieuses; la communication relative au planning familial entre l'épouse, le mari et la belle-mère; la mobilité de la femme et sa capacité décisionnelle; l'acceptation des informations présentées sur le planning familial dans les médias; et l'exposition aux messages de planning familial des prestataires de soins de santé.
Résultats
Les analyses univariées révèlent, parmi les femmes ayant déclaré pratiquer les méthodes contraceptives modernes, une probabilité nettement supérieure d'alphabétisme (rapport de probabilité de 1,7), d'exposition à un milieu urbain (1,8) et de parité minimale de cinq naissances vivantes (2,0). Selon les analyses multivariées, les femmes alphabétisées, de niveau économique élevé, dont la belle-mère avait déclaré avoir abordé avec elles la question du planning familial, et exposées aux messages de planning familial de leurs prestataires de soins de santé, étaient deux à trois fois plus susceptibles que les autres de pratiquer la contraception. De plus, les femmes qui s'étaient dites favorables à la diffusion de messages de planning familial dans les médias étaient de 50% plus susceptibles de pratiquer la contraception.
Conclusions
Les objectifs à long terme d'amélioration des niveaux d'éducation et de la condition économique des femmes sont importants à la croissance de la prévalence contraceptive au Pakistan. Parallèlement, les responsables politiques devraient entreprendre des initiatives à court terme, telles que l'engagement de leaders religieux au soutien des programmes de planning familial, l'encouragement des efforts de diffusion par les prestataires de soins de santé communautaires et le ciblage de messages de planning familial à l'intention des belles-mères, ces interventions étant susceptibles d'accroître efficacement la pratique contraceptive des femmes.